Nathalie
ConstansPetite biographie à la mode Nathalie Constans
1966. Je nais. Mon papa est équipé
d’un beau tracteur tout bleu pour travailler sa terre.
1967. Ma maman part travailler avec sa belle machine à écrire
dans une petite mairie avoisinante.
1968. Je contracte ma première bronchite (à cause d’une
bête histoire de chauffage éteint par inadvertance). Depuis,
j’ai les bronches fragiles.

1969, j’entre à l’école maternelle. Comme on
peut le voir sur la photographie, je ne suis pas contente du tout.
1972, je découvre les albums du Père Castor en général,
et Marlaguette en particulier (récit de Marie Colmont, illustrations
de Gerda. – Flammarion, 1952). Cette histoire d’amitié
entre un loup et une petite fille frappe puissament mon imaginaire et
me change la vie.
1975. J’assiste, médusée, à ma première
fête de l’Humanité (section locale du Lot et Garonne).
Mes parents y font l’intéressante acquisition d’un
vinyl des Chœurs de l’Armée Rouge. Pour moi, plus rien
ne sera jamais comme avant.
1976. L’année du drame : mon abonnement à Pif Gadget
n’est pas renouvelé.
1977. On me scolarise dans un collège improbable. D’ennui,
j’attaque la lecture des poètes. Surtout Rimbaud, Arthur.
Celui qui change la vie.
1979. Ma mère assiste à un concert de Jean Ferrat. Elle
en revient toute chose. J’écoute avec attention le vinyl
qu’elle en rapporte et me sens moi aussi toute chose.
1981. Je profite de la vague rose pour faire une crise mystique. Elle
dure trois jours : le temps d’un séjour organisé pour
édifier la jeunesse par les catéchistes locaux. Youkaïdi,
youkaïda. Dans le même mouvement, je dévore Les Chants
de Maldoror, d’Isidore Ducasse dit le Comte de Lautréamont.
Lequel bouleverse radicalement mon existence.
1982. Je découvre concomitement les réunions de cellule
du Parti communiste et les ouvrages de Georges Orwell. Ce qui me déclenche
un début de shizophrénie.
1986. J’ai la pertinente idée d’aller confirmer à
l’Est mes engagements politiques. J’en reviens aussi attérée
que dépitée. Je lis dans la foulée La Plaisanterie,
de Milan Kundera (Folio n° 638, préface de Louis Aragon sur
le « socialisme à visage humain »). Je déchire
fébrilement ma carte du PCF et entre dans une période de
mutisme politique. La même année, Malik Oussekine meurt rue
Monsieur le Prince.
1988. Je décide de devenir institutrice. Je découvre l’école
laïque, gratuite, républicaine et obligatoire, la pédagogie,
les enfants, Célestin Freinet et le plaisir de m’occuper
de la petite bibliothèque de l’école. Question lecture,
débarassée de Lénine, je peux enfin me consacrer
avec délices au polar et à la bande dessinée. C’est
un changement conséquent de mes conditions de vie.
1995. Je décide de devenir documentaliste de lycée, histoire
d’agrandir la bibliothèque. Pour fêter ça, je
vais à New York. J’en reviens gravement convaincue que mon
mutisme politique ne peut plus durer. Je me mets à écrire.
1997. Mon premier texte Nous n’avions pas fini… me permet
de remporter le concours du festival de Bergerac, « Suite pour série
noire ». Il est publié dans la revue 813 numéro 64
d’octobre 1998.
2000. La revue L’Ours polar publie dans son numéro 10 une
nouvelle intitulée Lupa versus lupus.
2001. Je décide de demander ma mutation dans un lycée professionnel
de la Seine-Saint-Denis : je ne vois pas à qui d’autre qu’aux
petits « sauvageons » je pourrais tenter de communiquer le
plaisir de lire. Je découvre William Faulkner, Louis-Ferdinand
Céline, Malcolm Lowry, Jean Genêt. Ils me compliquent la
vie à force de me poser de bonnes questions sur la littérature
et l’engagement.
2002. La revue Bleue publie dans son numéro 7, Compte à
rebours, également une nouvelle.
2003. Les élèves sont adorables. Ils me posent d’excellentes
questions sur l’engagement politique. J’écris, obsédée
par deux citations. L’une d’Arthur Rimbaud : « Je est
un autre ». L’autre de Didier Daeninckx : « J’écris
pour préserver les corps ».